Remédier aux inefficacités du secteur de la santé au Kenya pour des soins de santé de qualité et abordables
29 avril 2024
Author: Derick Ngaira
Photo : FNUAP Kenya

La Journée mondiale de la santé, le 7 avril 2024, s’est déroulée sur fond de rapports soulignant le sort des patients incapables d’accéder aux services médicaux au Kenya en raison de la grève en cours des travailleurs de la santé. Le gouvernement insiste sur le fait que le pays est confronté à un espace budgétaire limité pour répondre aux demandes des médecins conformément à la convention collective de 2017.

De tels récits mettent en lumière l’intersection difficile entre la qualité des soins de santé et les contraintes financières. Ces histoires soulignent les problèmes systémiques plus larges au sein du système de santé du pays, où les barrières économiques exacerbent les crises liées à la santé, plongeant les familles dans un état de dénuement.

Au cours des dernières années, l’accent a été mis sur la réalisation de la couverture sanitaire universelle (CSU), un objectif majeur du programme de développement national du pays. Cet engagement a été renouvelé, notamment dans le régime actuel, avec l’adoption de quatre lois sur la CSU : Fonds social d’assurance maladie (SHIF), Financement de l’amélioration des installations, Santé numérique et Soins de santé primaires. Une décision qui redonne vie au secteur.

Le changement de paradigme proposé dans le financement de la santé dans le pays n’aurait pas pu arriver à un meilleur moment. Les données montrent que les donateurs s’éloignent du pays suite à son changement de statut de pays à faible revenu à pays à revenu intermédiaire-faible. Bien que l’abandon de l’aide étrangère soit une réussite louable, si elle n’est pas bien gérée, cette transition pourrait entraîner une annulation des progrès réalisés dans le secteur de la santé.

L’analyse de l’Institut africain pour les politiques de développement (AFIDEP) indique que les déductions de 2,75% des employés kenyans par le biais de la SHIF pourraient potentiellement doubler les cotisations totales des plus de 60 milliards Kshs collectés chaque année par la Caisse nationale d’assurance maladie (NHIF) en 125 milliards Kshs. Néanmoins, si les inefficacités ne sont pas corrigées, une mobilisation accrue des ressources nationales ou davantage d’argent pour la santé ne garantira peut-être pas l’accès de tous à des soins de santé abordables. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, l’amélioration de l’efficacité des systèmes de santé pourrait permettre d’économiser 20 à 40 % des dépenses de santé actuelles.

Il convient de remédier à la perte de ressources publiques en matière de soins de santé, due par exemple à de fausses déclarations. Récemment, la Secrétaire du Cabinet à la Santé, Mme Susan Nakhumicha, s’est avoué que les contribuables auraient pu perdre des 20 milliards Kshs grâce à des demandes frauduleuses du NHIF en 2023. Il ne s’agit pas d’un cas isolé de détournement de fonds publics au sein du Ministère de la Santé. D’autres facteurs provoquant des inefficacités dans le secteur sont les prix des médicaments plus élevés que nécessaire, les erreurs médicales, la fragmentation, la qualité des soins sous-optimale, la sur-utilisation des produits, la fourniture de produits de qualité inférieure et les erreurs médicales.

En outre, il existe un besoin urgent d’une intégration plus étroite des initiatives de santé menées par différentes parties prenantes afin de favoriser les synergies, de rationaliser l’allocation des ressources et d’améliorer l’efficacité globale et les résultats en matière de santé. Cette approche minimisera la duplication des efforts et des ressources et créera un cadre plus cohérent et rationalisé en évitant le chevauchement des activités et en contribuant à réduire les coûts administratifs, conduisant à une infrastructure de soins de santé plus résiliente.

En conclusion, la grève en cours des travailleurs de la santé a révélé les dessous sombres de notre système de santé. Le pays devrait s’orienter vers la construction d’un système de santé résilient et réactif qui garantit aux citoyens un bon rapport qualité-prix grâce à des services efficaces. Le secteur étant actuellement dans l’incertitude, il est nécessaire de s’engager dans des actions concrètes qui garantiront que la santé pour tous reste plus qu’une simple aspiration noble.

L’éditorial a été publié pour la première fois par The Star Kenya et Citizen TV Digital.

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